N’oubliez pas de rêver !

Comme beaucoup, j’ai passé une grande partie de mon enfance devant Singing in the rain et Les parapluies de Cherbourg. J’étais une telle adepte, que mon salon devenait occasionnellement une scène de spectacle, où mes parents regardaient avec indulgence mes créations tout droit sorties des Demoiselles de Rochefort. Du coup, vous l’aurez compris, lorsque j’ai entendu parler de La La Land, mon cœur a oscillé entre l’impatience et l’appréhension. Facilement critique et toujours très méfiante face aux films les plus attendus, je suis là bien obligé de m’avouer vaincue : La La Land est un chef-d’œuvre musical. 

C’est le troisième long-métrage de Damien Chazelle après Guy and Madeline on a park bench et Whiplash qui avait déjà remporté un franc succès à sa sortie en 2014. Cette fois, son film dépasse toutes les attentes : triomphe au box-office, 7 prix aux Golden Globes de cette année et, chose rare, 14 nominations aux Oscars. Avec ce musical, le réalisateur est entre la reprise, l’hommage et la création. Il s’est inspiré des comédies musicales des années 30 à 50, gardant un format et une narration classique tout en en faisant un film moderne. Ce mélange crée une atmosphère presque intemporelle, abordant une thématique pas neuve mais toujours d’actualité : la difficulté pour les artistes de percer à Hollywood. Et quoi de mieux que de le faire en chantant et en dansant à la manière de Gene Kelly ? Les hommages aux classiques du genre y sont très importants, entre Singing in the Rain, Grease et West Side Story, la liste est longue.

Le film reprend tous les codes de ces films musicaux : les longs plans séquences, les chorégraphies de groupes et les claquettes. La caméra est utilisée de façon dynamique, mouvante et dansante, donnant une musique au film même lorsqu’il n’y en a pas, et les chansons sont simplement envoutantes. Mais passons, car si vous êtes déjà un adepte du genre, vous avez probablement déjà décidé d’aller le voir. Alors qu’est-ce que La La Land apporte de nouveau ? Damien Chazelle est un perfectionniste, cela se voit. Mais la grande force du film, c’est aussi son naturel. Les deux acteurs ne sont pas des danseurs, musiciens ou chanteurs professionnels pourtant Ryan Gosling interprète tous les morceaux au piano lui-même et Emma Stone chante à deux reprises directement sur le plateau. « Nos personnages sont deux apprentis artistes, si bien qu’on n’est pas censés être des danseurs et des chanteurs accomplis », explique-t-elle. « D’ailleurs, Damien [Chazelle] tenait à ce que nos rapports soient vivants et bruts d’une certaine façon, même si on participe à d’extraordinaires scènes de chorégraphie. Du coup, on était presque encouragés à commettre des erreurs ».

Ce film est sur certains aspects une sorte de parodie du genre musical. Le couple incarné par Emma Stone et Ryan Gosling est l’antithèse parfaite des amoureux des comédies musicales. La narration s’éloigne petit à petit du niais, de l’attendu et du simpliste et s’accroche à une évolution plus réaliste et terre-à-terre de ces personnages. La La Land, c’est comme le jazz : une danse narrative enflammée entre les personnages et la caméra. Bref, je ne sais pas ce que vous faites de votre dimanche, mais moi, je retourne le voir !

© Maëlle Colleu-Hepke
© photos : film La La Land – allocine 

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